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Les fusillés (1940-1944)

  • Homme :
  • Un hommage aux résistants oubliés de la Seconde Guerre mondiale.
  • Contenu :
  • Ouvrage de 10 millions de signes, 1952 pages imprimées, 4500 biographies.
  • Sources :
  • Association des familles de fusillés, archives du Maitron, Archives de la DAVCC.
  • Lecture :
  • Raconte les histoires des hommes et femmes morts pour avoir défendu leur patrie contre l'occupant nazi .

Publié à l’occasion du 70ème anniversaire de la capitulation de l’Allemagne, « Les fusillés 1940-1944 » est un hommage rendu aux oubliés de la seconde guerre mondiale, ces résistants de l’ombre, ces résistants inconnus, morts pour avoir défendu leur patrie contre l’occupant nazi et les collaborateurs du régime de Vichy.
Le sous-titre de l’ouvrage « Dictionnaire biographique des fusillés et exécutés par condamnation et comme otages et guillotinés en France pendant l’Occupation » explicite clairement son contenu. Il en est de même pour cette phrase de Georges Pitard, fusillé au Mont-Valérien le 20 septembre 1941, mise en exergue : « L’avenir nous redonnera la place qui nous convient».

L’entreprise éditoriale est véritablement hors normes, 10 millions de signes, 1952 pages imprimées sur papier bible, 200 photos, 4500 biographies. Elle est le fruit de 10 ans de travail et d’un collectif de 111 auteurs, dont une équipe d’historiens et de chercheurs. Claude Pennetier, Jean-Pierre Besse, Thomas Pouty et Delphine Leneveu ont coordonné les travaux.

Une longue et passionnante « Introduction générale » à lire absolument, nous permet de comprendre la démarche des auteurs et l’organisation de l’ouvrage. Explications nécessaires quant aux sources d’information, quant à la définition essentielle du mot « fusillé ».

Les fusillés (1940-1944)

Sources de l’ouvrage

Les sources qui valident le solide ancrage historique de l’ouvrage, sont nombreuses, elles font l’objet d’une liste complète et détaillée, dont on retiendra les plus importantes : l’Association des familles de fusillés qui a rassemblé les photos, les dates et les lieux d’exécutions, documents conservés au Musée de la Résistance nationale de Champigny-sur-Marne, l’Association pour l’étude de la résistance intérieure, utile pour la connaissance du contexte régional des fusillades, le Maitron, dictionnaire biographique, mouvement ouvrier, mouvement social, un grand nombre de fusillés étaient en effet des syndicalistes CGT, CFTC, des militants communistes, socialistes chrétiens ou des membres de la fédération sportive et gymnique du travail (FSGT) et les Archives de la DAVCC, Division des archives des victimes contemporaines, installées à Caen, où sont réunis les dossiers établis par les Ministères et Secrétariat d’Etat aux Anciens Combattants et les listes des fusillés établies par les services allemands.

Les fusillés (1940-1944) #2

Organisation de l’ouvrage

Les auteurs ont dû faire des distinctions d'importance autour desquelles s'articulent quatre corpus:

  • Biographies des fusillés:  pp. 51-1862. Corpus central qui rassemble les noms des hommes fusillés par condamnation, des fusillés comme otages, victimes d’une répression « légale » organisée par l’armée occupante et le régime de Vichy
  • Biographies des femmes exécutées : pp.1863-1882 [Liste non exhaustive]. Les femmes, dont le rôle fut essentiel dans la lutte contre l’occupant, ont été plus difficiles à identifier que les hommes, d’autant que les nazis ne les considéraient pas comme des combattantes. Aussi avaient-elles droit à un traitement  spécifique, « pudiquement » dissimulé à leurs compatriotes : condamnées à mort en France, elles étaient déportées en Allemagne,  envoyées dans des camps de concentration ou guillotinées
  • Biographie des morts sous la torture et des suicidés : pp.1883-1924 [Liste non exhaustive]. Il n’existe pas d’archives systématiques concernant les torturés et les suicidés, toutefois pour 10% des biographies, la torture est explicitement évoquée. Police française et autorités allemandes avaient intérêt à faire passer les morts sous la torture pour des suicidés. Les tortures ont été révélées soit par des témoignages de coinculpés ou par des lettres sorties clandestinement de prison
  • Liste des exécutés sommaires : pp.1925-1932. Cette liste, à la fin du dictionnaire, rassemble les noms des hommes, victimes d’exécutions sommaires, relevant d’une répression « aléatoire ». Un code permet d’accéder aux  biographies en ligne

Lecture

Il fallait donner à ces hommes et à ces femmes la place qui leur convenait : celle de héros modestes, humbles, dont aucun livre jusqu’à ce jour n’avait raconté l’histoire. Il fallait raconter les itinéraires, les conditions d’arrestation et d’exécution de ces milliers d’hommes et de femmes, communistes, gaullistes, socialistes, syndicalistes, ou bien tout simplement patriotes-résistants, juifs, chrétiens, ou libres penseurs, tous morts pour s’être opposés aux forces nazies, à la Milice et au régime de Vichy.
L’entreprise colossale est aboutie, réussie, éminemment émouvante et dresse un tableau inédit de la France sous l’Occupation.
Chaque notice, plus ou moins longue et détaillée, conçue sur un même modèle, fait sortir de l’anonymat, un résistant, un homme ou une femme qui s’est engagé contre l’occupant, qui a vécu dans la clandestinité, qui a certainement beaucoup souffert avant d’être exécuté.

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Une photo nous permet parfois d’appréhender la notice de façon plus intense, les morts ont un visage, l’histoire prend vie autrement et nous bouleverse.

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On est surpris par leur appartenance sociale, pour la plupart très modeste,  Albert COCHEZ journalier, Isaac GOUREVITCH artisan cordonnier, Alexandre Le NOHAIC commis forain, Raoul MANDOUL charpentier, Marius HAAF marchand de peaux de lapins, Augustin LOMBAERTS ouvrier houilleur, Jean GARNIER meunier, Josef KAPE brocanteur ou Joseph DI FUSCO simple cantonnier.
On rencontrera aussi des enseignants comme Léonce LAVAL, Claude SCHMERBER, des dirigeants d’industries comme Léon JOST, des ingénieurs comme Raymond MATTER, des étudiants en médecine comme Alexandre FLOR, des architectes comme Marcel DOUPHY, des journalistes comme Louis PELLETIER et de jeunes lycéens comme Aimé FULLERINGER ou André CORDIER.

Une seule photo de femme dans cette considérable somme, celle d’Olga BANCIC, juive roumaine, militante communiste à 16 ans, elle fut incarcérée 2 ans à Bucarest pour ses activités politiques. Libérée elle gagna la France en 1938 et rejoignit, dès le début de l’Occupation,  l’OS (Organisation Secrète) et les FTP-MOI (Francs-tireurs et partisans-Main-d’œuvre immigrée) sous le pseudonyme de Pierrette, elle assurait le transport des armes et des munitions. Arrêtée en 1943 elle fut interrogée dans les locaux des Brigades Spéciales et battue à coups de nerf de bœuf. Déportée en Allemagne, condamnée à mort, elle fut guillotinée le jour de ses 32 ans. Une histoire très émouvante et trop rapidement contée ici, dont il faudra lire le détail pour lui rendre un juste hommage.

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Les auteurs ont mis 10 ans à écrire ce beau livre qui nous rapproche d’une histoire vécue pendant 4 longues années, dans la douleur, le sang, le sacrifice et la mort. Il faudra au lecteur du temps pour TOUT lire et faire ainsi revivre, dans cette forme d'hommage, ces hommes, ces femmes, ces français, ces étrangers récemment naturalisés, ces jeunes gens, ces hommes d'âge mûr, de toutes conditions sociales, mais appartenant souvent aux classes les plus modestes, toujours convaincus, durant cette terrible seconde guerre mondiale, de se battre et de donner leur vie pour un idéal de liberté et de paix.

Les Fusillés (1940-1944) Les Éditions de l’Atelier - 30 euros